Antonio Barbieri est originaire de Reggio Emilia. Déjà jeune, il possède une voix de baryténor longue et souple, ainsi que d'un solide sens dramatique.
On repère le ténor à Modène en 1718 puis 1719 dans notamment Alessandro severo de Lotti avec la Pellizari. Il apparaît aussi à Lodi dans Armida al campo d'Egitto de Vivaldi, premier contact qui se traduit pas une nouvelle collaboration à Mantoue dans La Candace avec la soprano Zani et le castrat Archi. Antonio passe aussi à Reggio Emilia pour chanter Nino de divers auteurs avec la Bordoni et Borosini.
En 1720, Vivaldi offre à Barbieri ses débuts à Venise, au San Angelo, dans La Verità in cimento et Filippo re di Macedonia. Dès lors, sa carrière se déroule essentiellement dans la cité vénitienne : deux autres théâtres vénitiens font appel à lui en 1722, le San Giovanni Grisostomo et le San Samuele, où il chante Porta, Chelleri, Capelli avec des chanteurs de grand calibre tels que Cuzzoni, Bernacchi, Tesi et le castrat Pasi. Après des apparitions à Gênes et Rome (Vivaldi, encore), Barbieri retrouve donc Venise en 1724, où il paraît dans divers théâtres avec Bordoni, Merighi et Scalzi dans deux opéras de Vinci, Berenice d'Orlandini, et Il Trionfo della virtù de Brusa. Barbieri peut en outre se flatter du titre de virtuoso di S.A.S. Filippo d’Hassia Darmetad [Hesse Darmstadt], ce qui signifie qu'il est employé par la cour de Mantoue.
Ensuite, Barbieri brille à Florence et Parme. De retour à Rome, pour les carnavals 1726 puis 1727, il chante des créations du jeune Metastasio : il est même Énée dans la Didone abbandonata de Vinci et Cosroe dans Siroe de Porpora, puis en 1729 l'Ezio d'Auletta et le premier Scitalce dans la Semiramide riconosciuta de Vinci. Entre-temps, Barbieri se produit à Naples où il retrouve les grands musiciens napolitains que sont Vinci, Hasse et Mancini, avec des partenaires comme Carestini, la Turcotti, Scalzi ou encore la Stabili. Le voici à Naples encore en 1729-30, pour chanter Hasse, Feo et Leo ; dans Semiramide de ce dernier, il côtoie Minelli et la Tesi.
Alors que la vague métastasienne arrive à Venise au cours des années 1730, Barbieri s'impose à nouveau comme un pilier des scènes locales de 1730 à 1733 – si l'on excepte Pavie, où il reprend Farnace, grand succès de Vivaldi. Barbieri incarne en ce temps les rôles repris ensuite par tous les ténors, comme Iarba dans la Didone abbandonata (Sarro), Fenicio dans Demetrio (Hasse), Cosroe dans un pasticcio de Siroe avec Nicolino. À Venise, Barbieri chante aussi avec le grand Farinelli dans l'Adriano in Siria de Giacomelli – il est Adriano. En 1734-35, on l'entend à Parme et Florence avec la Viscontina, puis les années suivantes à Venise, Mantoue (Alessandro nell'Indie de Galuppi), Venise encore et Modène. Ses dernières prestations scéniques connues ont lieu en 1740 à Turin, dans des opéras de Galuppi et Leo (Achille in Sciro) avec Gizziello et la Strada.
Antonio semble croiser la route de la soprano Livia Bassi à Naples en 1729, par exemple dans Tamese de Feo. On trouve une mention antérieure de Livia Bassi à Venise en 1727, cette fois-ci avec le ténor Fabri. On ne l'identifie plus ensuite qu'aux côtés d'Antonio, qu'elle doit épouser vers 1730 : notamment à Pavie en 1731 et Florence en 1734-35. Elle accompagne Antonio à Vienne en 1735-36 (voire la saison suivante), engagement hors d'Italie unique dans leur carrière. Antonio et Livia chantent à Modène en 1738-39, notamment dans un Bajazette anonyme, avec le castrat Santarelli et la diva Stabili.
Les vieux jours d'Antonio se déroulent plus paisiblement loin des planches : il est engagé à la chapelle de San Marco en 1733, et y chante quotidiennement jusqu'en 1759. Il semble décéder en 1772.
Antonio Barbieri était sans aucun doute l'un des meilleurs ténors de son époque et l'un des plus recherchés des années 1720 et 1730, avec Fabri, Pinacci et Tolve. Il chante tous les genres de musique, de la tradition vénitienne au style napolitain en vogue. En revanche, Livia était manifestement une chanteuse secondaire, qui a pu souffrir d'être dans l'ombre d'Antonio.
Barbieri foule les planches à une époque où les ténors commencent à se frayer un chemin vers le premier rang des interprètes d'opéras, alors que les opéras de Metastasio d'une popularité croissante constituent un véhicule flatteur. Les rôles de rois, pères et tyrans souvent incarnés par les ténors réclament des chanteurs doués d'un charisme évident. Barbieri en possédait à revendre, et ses partitions exigent une grande fermeté d'accent sur une tessiture étendue, sans atteindre les effroyables écarts écrits pour un Borosini.
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