Elisabeth est la sœur de Therese et Barbara Teyber, également sopranos ; ou du moins la demi sœur si l'on en croit la rumeur selon laquelle elle serait le fruit des amours entre le violoniste Matthaüs Teyber et la contralto Vittoria Tesi, installée à Vienne à la fin de sa carrière.
Le parrainage réel ou fantasmé de cette cantatrice, assurément l'une des plus renommées de l'histoire du chant, est de bon augure pour Elisabeth. Quoi qu'il en soit, c'est bien la Tesi qui assure sa formation musicale et fait d'elle une excellente tragédienne et vocaliste, dotée d'un large et très agile soprano.
À Vienne, Teyber crée la redoutable Circe dans Telemaco de Gluck, pour les noces de Joseph II et Marie-Josèphe de Bavière, en 1765. Pour une cantatrice d'environ vingt ans, le rôle est aussi lourd sur le plan vocal que dramatique ! Circé exige la haute virtuosité seria dans l'air d'entrée In mezzo al mar crudele, et une déclamation véhémente (reprise dans l'Armide de Paris) dans la scène d'incantation. Deux ans plus tard, elle chante dans Amore e Psiche de Gassmann ainsi que dans la festa teatrale La Partenope imaginée par Metastasio et Hasse pour le mariage de Ferdinand IV de Naples et Marie-Caroline d'Autriche, et les enthousiasme au point d'être recommandée par ces deux sommités musicales pour débuter en Italie, où l'on se méfie toujours d'une chanteuse germanique – ce qui est vrai dans les pays germaniques aussi, d'ailleurs !
Elisabeth débute au San Carlo dans cette même œuvre, puis chante Alessandro nell'Indie de Sacchini en 1768, avec Tibaldi et Rauzzini, ainsi qu'Ipermestra de De Majo, entre autres, jusqu'à la fin de l'année 1769. Durant cet intervalle, elle trouve le temps de se produire abondamment à Venise (opéras de De Majo, notamment) et Florence.
En 1771-72, E. Teyber se rend en Russie et chante une saison à Moscou, notamment Antigono de Traetta avec le ténor Prati et les castrats Toschi et Monanni. Néanmoins, le séjour a nuit à sa santé, et elle s'interrompt un temps.
Mozart écrit à sa sœur, en 1773 :
Mme Teyber est en ce moment à Bologne. Elle jouera à Turin au carnaval prochain [...]
Le fait que Mozart évoque la cantatrice dans sa correspondance est la marque d'une renommée certaine ; à Turin, elle campe la pathétique Antigona de Mysliveček en 1773 ou encore la Cleopatra de Monza en 1775. Teyber chante également à Gênes et Naples, à plusieurs reprises. Dans la cité parthénopéenne, Teyber obtient un salaire supérieur à celui d'Anna De Amicis, pour la saison 1776-77 ! Avec le castrat Rubinelli et les ténors Ansani et Cortoni, elle est prima donna dans Semiramide riconosciuta de Guglielmi ainsi qu'Arianna e Teseo de Fischietti, entre autres.
En 1778, Elisabeth se produit dans sa Vienne natale, dans le Singspiel. L'empereur Joseph et le duc Leopold discutent de l'opportunité d'engager Elisabeth Teyber, en complément d'une troupe qui compte déjà la Cavalieri et Aloysia Lange... Leopold écrit (en français dans le texte) :
Je ne manqueray pas de m'informer selon vos ordres et de vous rendre compte où se trouve la Teüberin, mais je doubte qu'elle veuille accepter de chanter à l'opera buffa.
Joseph répond, probablement à la suite de négociations (en français dans le texte) :
pour la Teüberin, 50 Sequins le mois, pour ne jouir que de sa vue, sans l'entendre chanter, c'est un prix exorbitant pour sa laideur...
Mais le cantatrice s'est mariée, et ne se produit plus sur scène, quoi qu'il en soit. Elle a réussi à s'imposer comme l'une des premières chanteuses de son temps, malgré une carrière un peu courte. Sa virtuosité était formidable, et sa voix étendue jusqu'au mi5 au moins. |