C'est à Pise qu'on repère Maria en 1741 dans l'intermezzo La Contadina mobile de Chinzer. À Florence l'année suivante, elle continue dans le répertoire léger (Leo, Auletta avec le ténor Laschi) au Teatro Coletti, mais incarne aussi de petits rôles dans l'opéra sérieux Tito Manlio de Fini au Teatro Cocomero. En 1742-43, Maria est à Bologne avec de brillants interprètes bouffes, comme Baglioni et la Rossignoli, et participe là encore aux productions d'opera seria comme seconda donna. Elle paraît régulièrement dans La Finta Cameriera de Latilla, classique de l'époque, qu'elle donne encore à Livourne, puis Venise en 1743. Maria s'installe trois ans dans la Sérénissime, et fréquente divers théâtres qui sont alors l'épicentre européen de la création d'opera buffe. Outre plusieurs pages de Latilla, Maria chante Bertoni, Maggiore et Scolari (La Fata meravigliosa). Elle retrouve aussi des partenaires réguliers comme le couple Laschi ou le ténor Pellegrino Gaggioti, et celui qui devient son partenaire attitré : Carlo Paganini, qui fait sa première apparition dans Lo Scialacquatore alla fiera d'Orlandini en 1745.
Dès lors, Carlo et Maria se produisent toujours en duo, devenant un couple bouffe très réputé, suivant l'exemple d'Anna et Filippo Laschi, ou Costanza et Francesco Carattoli. Maria participe toutefois occasionnellement encore à des productions d'opéra sérieux (rôle titre d'Artaserse de G. Scarlatti à Lucques en 1747 avec la Fumagalli et le castrat Elisi). Les Paganini parcourent la moitié nord de l'Italie, de Prato et Florence à Pise en passant par Venise, Vérone, Turin, Milan et Vercelli jusqu'en 1752. Ciampi fournit des titres importants de leur répertoire notamment avec La Favola de' tre gobbi (Venise 1749, repris l'année suivante à Turin, Milan, Vérone et Padoue !) et Bertoldo, Bertoldino e Cacasenno. Un talent émergent est aussi au programme : les Paganini créent une nouvelle version de L'Arcadia in Brenta de Galuppi en 1750 (Milan), et d'autres titres s'y ajoutent (Il Mondo della Luna, Il Mondo al rovescio). Toutes ces pages sont de la plume d'un juriste qui se lance dans le théâtre : un certain Goldoni ! Les Paganini défendent ardemment ses premières comédies. Il faut noter par ailleurs que Maria comme Carlo exerce aussi des talents de gestionnaires/imprésarios, ponctuellement, pour certaines saisons.
Leur carrière prend un tournant international : on les accueille pour le théâtre de Sans-Souci à Postdam pour deux années, entre 1754 et 1756. Les Paganini y jouent leurs classiques de Ciampi, notamment. Des différends avec le directeur (et basse) Cricchi et le sévère roi Frédéric II, et plus prosaïquement le début de la guerre de Sept Ans, expliquent leur départ.
En Italie, après Novara, les Paganini travaillent exceptionnellement séparement : Carlo présente des spectacles à Plaisance, et Maria participe encore à quelques opere serie comme seconda donna, par exemple Ipermestra de Galuppi à Milan en 1758 – et même comme prima donna à Lodi avec le castrat Priori. Cependant, Londres les appelle.
Plus précisement, la prima donna seria et directrice du King's Theatre Colomba Mattei fait appel au couple de renom. Les Paganini ont la responsabilité de choisir et produire le répertoire avec les chanteurs engagés et en accord avec l'administration artistique en place. Entre 1760 et 1762, les Paganini feront découvrir de nombreux titres bouffes aux Londoniens : outre leurs succès de Galuppi et Ciampi, citons Le Pescatrici de Bertoni et la création d'opéras du maestro local Cocchi, Le Nozze di Dorina et La Famiglia in scompiglio. On y trouve la contralto Eberardi et la basse Giovanni Battista Zonca. Burney et d'autres s'accordent à trouver Maria plutôt ronde et âgée (pour les standards d'alors, autour de 40 ans...). La presse salue toutefois le grand succès de la chanteuse, d'emblée, là où Carlo est jugé plus grossier, voire dénué de voix. George Hogarth loue « the admirable acting and singing of Signora Paganini » ; Gray évoque la « delightful new woman in the burlettas » et Walpole précise : « The comic opera pleases extremely; the woman Paganini has more applause than I almost ever remember; every song she sings is encored. » La seconde saison n'a toutefois plus la nouveauté et le succès de la première ; malades, en proie au mal du pays et déçus, les Paganini décident de quitter Londres.
La carrière des Paganini touche à sa fin. On les retrouve à Alessandria en 1763, puis Brescia en 1765 (I Matrimoni in maschera de Rutini). Maria se tourne, sans grand succès, vers une carrière sérieuse, désormais sans Carlo. Elle est prima donna seria à Pavie en 1767 avec le ténor Croce, et encore à Palerme en 1773 avec le castrat Sartorino. Vers cette époque, elle écrit au padre Martini afin qu'il intercède en sa faveur auprès de Farinelli, retraité à Bologne : elle est aux abois financièrement.
Du duo d'artistes, Maria était certainement la plus douée. Les Paganini ont bien contribué à diffuser le genre bouffe en Italie et au-delà.
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