Comme c'est le cas de bon nombres d'artistes de cette époque, où le genre lyrique émerge à peine, il est difficile de retracer en détail le parcours de ces deux musiciens.
On sait que c'est à Rome, sa ville natale, que Maddalena fait la connaissance de son époux, la basse Francesco Manelli, dit Il Fasolo. Les Manelli forment une troupe avec le compositeur, joueur de théorbe et poète Benedetto Ferrari, ensemble itinérant qui se produit dans le nord de l'Italie. En 1636, ils participent notamment à des festivités à Padoue, en prélude à un tournoi organisé par le marquis Pio Enea Obizzi ; Maddalena y interprète L'Ermiona de Sances avec Anselmo Marconi, Girolamo Medici et Felicita Uga.
Arrivés à Venise, l'ensemble des Manelli décide de produire à ses frais un opéra dans un théâtre public (le San Cassiano de la famille Tron), fait encore inédit. Historiquement, Maddalena est donc la toute première chanteuse à paraître dans un opéra destiné à un public payant, et non dans le cadre d'un spectacle de cour ou d'un concert : elle crée L'Andromeda (1637) puis La Maga fulminata (1638) pour la réouverture du San Cassiano, avec la musique de son mari et entourée d'une distribution entièrement masculine essentiellement venue de la chapelle San Marco, y compris pour incarner les déesses, avec par exemple Anselmo Marconi et la basse Bisucci. Après ce premier essai, les Manelli s'installent dans une nouvelle salle, SS. Giovanni e Paolo, où sont présentés successivement La Delia, Armida et Adone, tandis que le jeune Cavalli tente sa chance – avec le succès que l'on sait – au San Cassiano. Monteverdi s'engouffre également dans la brèche et propose Arianna dans un troisième théâtre, le San Moisè.
Dans un jeu de chaises musicales, c'est la troupe de Manelli qui crée parallèlement Il Ritorno d'Ulisse in Patria de Monteverdi au San Cassiano en 1640, où Maddalena incarne Minerve (et peut-être d'autres rôles), Francesco Neptune et Astarco, et Giulia Paolelli Pénélope. Le fils du couple, Costantino Manelli, est probablement l'interprète de Télémaque. Le succès est au rendez-vous et la troupe va présenter l'œuvre à Bologne, avant une reprise vénitienne la saison suivante (fait exceptionnel dans la suite de l'histoire lyrique), cette fois-ci au théâtre SS Giovanni e Paolo.
Les distributions de l'époque restent le plus souvent inconnues, et d'autres chanteuses, surtout venues de Rome, viennent à Venise recueillir les suffrages du public, comme Felicita Uga et surtout la première diva de l'histoire du chant : Anna Renzi. Francesco Manelli étant employé à San Marco à partir de 1638, on peut supposer que le couple reste un temps à Venise et prête leurs voix aux productions lyriques qui y fleurissent dans les années 1640, en particulier dans un Alcate écrit par Franceso en 1642.
En 1645, l'industrie lyrique vénitienne naissante connaît une parenthèse et les Manelli se rendent à Parme où ils sont tout deux engagés, Maddalena comme virtuose de cour et Francesco comme compositeur. Il présente plusieurs opéras à succès dont ne subsistent que les livrets, dont Le Vicende del tempo (1652) et La Licasta (1662). C'est à Parme que Francesco s'éteint.
Il est grand dommage qu'on n'en sache pas plus sur les Manelli, et qu'aucune distribution ni partition d'opéra n'ait survécu. Ce couple a donné un élan crucial à l'explostion du genre opéra, dont l'ouverture au public a été décisive. |