La triste réputation d'une certaine Viscioletta semble déjà établie à Rome au milieu des années 1760, quand Winkelmann annonce le départ de la cantatrice pour Londres sur un ton des plus crus. Sa beauté semble faire des ravages et lui devoir une image sulfureuse. De fait, on la retrouve à Londres dès 1766 dans des pièces de Piccinni, puis au Haymarket où elle participe au Mercato di Malmantile de Fischietti en 1769, avec notamment le ténor Lovattini. Benedetto Croce comme d'autres distinguent cette cantatrice évoquée par Casanova comme « courtisane de profession, sous le titre de virtuosa » et Caterina Gibetti : il s'agirait d'une certaine Margherita Gibetti, née en 1744, et qui se produit dans plusieurs villes italiennes comme seconda donna seria, dont Bologne, 1771, ou encore Milan et Turin. Margherita réussit à se faire expulser de Naples (sa ville natale) après y avoir chanté avec E. Teyber et De Amicis entre 1773 et 1775, en raison de ses mœurs légères. Margherita est certainement liée à Caterina, s'il ne s'agit pas de la même chanteuse ; le surnom est en tout cas identique : il évoque la sensualité de la cerise.
Moins mal vue, on entend beaucoup Caterina Gibetti à Venise. En 1771-72, elle participe à la création du dernier opéra de Galuppi, L'Inimico delle donne. Une certaine Teresa Gibetti chante dans les mêmes productions, et l'on peut suppose que les cantatrices sont liées. On la retrouve au San Moisè en 1773, notamment dans Guglielmi.
Il est probable que la cantatrice se produise en Pologne entre 1774 et 1777, en particulier avec le ténor Guardasoni.
Elle fait toutefois partie de la troupe du San Samuele en 1778 et interprète L'Incognita perseguita d'Anfossi avec Afferri et Rachele D'Orta. Avec cette dernière, Gibetti interprète aussi une pièce sérieuse de Bortniansky. La même année, Gibetti se présenté à Naples au Teatro nuovo pour interpréter Anfossi et Paisiello. Elle aussi manque de se faire expulser du royaume de Naples !
Au début des années 1780, la soprano est engagée en Russie. L'impératrice Catherine II y fait donner nombre d'opéras bouffes avec une excellente troupe comprenant aussi le couple Jermoli et la basse Brocchi. À St-Pétersbourg, la Gibetti brille aux côtés d'Anna Davia, célèbre soprano réputée dans les genres serio et buffo : elles sont toutes deux prima buffe a vicenda. Le couple Marchetti ou encore le ténor Ristorini viennent aussi enrichir l'effectif. Néanmoins, Caterina se frotte aussi au grand genre : elle est Eurydice face au castrat Arnaboldi en 1782, dans L'Orfeo de Gluck. Les commentaires de sa prestation cette année-là ne sont pas forcément élogieux :
... il y eut hier, à la cour, un concert très froid et ennuyeux ; la Gibetti miaulait ainsi que Comaschino. Tous toussent et sont enrouées ; ainsi tout le monde fut enchanté que le concert se terminât de bonne heure.
De fait, à l'été 1783, le Comité des spectacles la convoque, et lui propose de se contenter de jouer la seconda donna seria, ce qui ne se produisit cependant pas. |