Giulia DE CARO |
1646 – 1697 |
dite Ciulla |
Autres orthographes |
D'extraction relativement modeste, Giulia (ou Ciulla en dialecte de Naples) étonne son voisinage par sa jolie voix.
Elle est répérée par un arracheur de dents, opération qui s'effectuait sur la place publique, agrémentée d'animations. Ce sieur Carpano décide de s'attacher les talents et le charme de Ciulla, et lui fait ainsi épouser son assistant, Carlo Ginelli.
Le jeune couple égaye tant bien que mal les activités de Carpano, et Ciulla ravit les passants par ses chansons napolitaines, mais aussi les airs plus nobles en toscan qu'elle exécute avec un art qui éveille l'attention des plus huppés. Ces admirateurs ont tôt fait d'extraire la belle à ses fonctions, et l'entretiennent avec largesse. La réputation de courtisane de la chanteuse ne la quittera pas – est-elle usurpée ? La jeune virtuose quitte Naples et s'installe avec sa cour et sa famille à Rome, en 1667. Elle y demeure quatre années, au cours desquelles elle se métamorphose et acquiert des manières plus présentables. Il est très probable aussi qu'elle y ait bénéficié d'une enseignement musical. On l'entend également à Venise.
De retour à Naples, donc, Ciulla se fait engager au San Bartolomeo dans un Annibale in Capua anonyme. Mais personne ne la prend au sérieux et l'accueil est moqueur. Provenzale lui écrit un rôle sur mesure en 1671 dans Lo Schiavo di sua moglie, où elle parvient à s'imposer, mais pas durablement. Ciulla fait carrément appel à l'aide d'un de ses protecteurs, qui prend la concession du théâtre : la cantatrice-impresario peut monter elle-même une saison prestigieuse, invitant les meilleurs musiciens d'Italie. Elle donne donc notamment Marcello in Siracusa de Ziani, Il Genserico et L'Orontea de Cesti. Elle brille particulièrement dans La Stellidaura vendicante de Provenzale, en présence du vice-roi Astorga son amant. Le fils du prince de Cursi, qui l'héberge, lui écrit des cantates mettant en valeur son agilité vocale.
Giulia De Caro ne renonce pas pour autant à ses activités d'impresario, et parcourt Rome, Gênes et Venise en quête de talents. Sa mauvaise réputation la suit toujours, et alors que son mari décède en sa présence au cours de ses pérégrinations, on l'accuse de l'avoir assassiné. Elle doit recourir à divers témoignages pour défendre sa cause.
En 1675, la cantatrice se produit encore devant un parterre de choix, pour l'anniversaire du roi ; elle est la Dori de Cesti.
Mais Ciulla est enlevée peu après et placée dans un couvent, arbitrairement. Sa seule échappatoire consiste à épouser un jeune noble et ainsi s'acheter une apparente respectabilité... Un certain Mazza se propose. La chanteuse ne paraîtra plus sur scène.
À sa mort, en 1697, les chroniqueurs les plus bienveillants célèbrent l'évènement en la qualifiant de putain, plus précisément un certain Domenico Conforto qui écrit :
È morta nel casale di Capodimonte, ove abitava col suo marito Lucio Mazza, sin dal tempo che si maritò, la famosa un tempo puttana e canterina Giulia De Caro, che, pria di maritarsi fu il sostegno del bordello di Napoli con suo grandissimo proveccio (essendo stata, dopo che si maritò col Mazza, persona assai civile, molto onesta e dabbene) ed ha lasciato facultà, ascendente a molte decine di migliaia di scudi, non vi essendo altri che l’unica sua figliuola procreata col detto suo marito d’età nubile, ed è stata seppellita miserabilmente nella Parrocchia del suddetto Casale, solo con quattro preti, una che, al tempo del suo puttanesimo, dominava Napoli, et sic transit gloria mundi! Il Mazza si è impossessato del tutto, col nome di padre e legittimo amministratore della figliuola.
Difficile d'être une femme indépendante et qui plus est artiste au XVIIe...
Maria Ercolano et la Cappella della pietà dei turchini ont présenté un spectacle en hommage à cette personnalité controversée de Naples. |
La Stellidaura vendicante |
Stellidaura |
F. Provenzale |
1674 |
Naples |
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J. Rivera, Academia montis regalis dir. A. De Marchi – CD Deutsche Harmonia Mundi 2013 |
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