Fille d'un barbier dresdois, celle que l'on appelle toujours Mlle ou Fraülein Conradi débute probablement dans sa ville natale : il lui faut certainement un minimum de renom pour être ensuite engagée à l'opéra de Hambourg en 1700 (ou 1690 d'après d'autres sources). Certaines sources lui donnent pour prénom Anna-Margaretha.
Elle remporte des succès éclatants sur la scène hambourgeoise, suscitant l'admiration de Mattheson, compositeur et ténor de la troupe – également chargé de la pénible tâche d'inculquer ses rôles à la cantatrice, totalement ignorante en matière de solfège. Mademoiselle Conradi crée des opéras de ce dernier, comme Cleopatra, ainsi que de Keiser, et les premiers opéras de Haendel, ce qui est attesté pour Almira. Ces pages témoignent d'un fort tempérament dramatique mais aussi d'une haute virtuosité jusque dans l'aigu. On admire sa beauté, son jeu et sa voix étendue du la grave au contre-ré. Une des rivales de Conradi à Hambourg est la soprano Rischmüller. Les deux chanteuses sont évoquées dans un roman de Hunold – fou amoureux de Conradi – sous les traits de Caelia et Arismenia dans Satyrischen Roman.
Après un passage à Brunsvick, elle passe au service de la cour berlinoise en 1706 et s'illustre dans deux œuvres à l'occasion de noces royales, dont le prologue de l'opéra ballet Sieg der Schönheit über die Helden, où Conradin incarne la Prusse et Vénus (1706) avec Messieurs Frobese, Stricker et Giovanni Michele Pieri. Ile est probable qu'elle prenne part à Das Frohlocken des Helicons und der Musen, œuvre de concert datée de 1707. L'année suivante, la diva crée le premier rôle féminin d'Alexanders und Roxanes Heirat de Stricker, avec le castrat contralto Campioli et la basse Grünewald en Alexandre. Cet opéra est donné pour célébrer le mariage de Sophie Louise et Frédéric Ier.
Le comte Gruzéwski épouse la fameuse soprano en 1711, ce qui met malheureusement fin à sa glorieuse carrière.
En à peine plus de dix ans de carrière, die schöne Conradine a laissé une forte impression sur l'opéra allemand entre Hambourg et Berlin, et inspiré les meilleurs compositeurs du temps. Après sa retraite, beaucoup de musicographes n'hésitent pas la placer devant toutes, malgré le succès des sœurs Döbricht ou de Pauline Kellner par exemple. Les distributions des années hambourgeoises sont généralement non indiquées, mais il est fort probable qu'elle incarne tous les premiers rôles des premières années 1700. |