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Cette soprano est un pur produit de son époque. En plein déchaînement rococo, marqué par une dérive certaine du chant serio dans une surenchère de virtuosité et de conquête du suraigu que tentent de contenir les courants réformateurs, Alberoni incarne peut-être ce que Metastasio déplorait : une voix essentiellement instrumentale et sans doute trop légère pour offrir un véritable poids dramatique.

En mai 1776, L'Esprit des journaux, traduisant le Giornale encyclopedico, annonce la jeune Lucia à Venise, dans Aristo e Temira de Bertoni avec Guadagni, David et Camilla Pasi :
[ses] débuts brillants ont annoncé les plus heureuses dispositions, & dont les efforts continuels promettent par la suite les plus grands progrès vers la perfection.
La même année, la soprano rejoint la fine fleur des chanteurs d'Italie pour l'ouverture du nouveau théâtre de Forlì, et créer le rôle de Creusa dans Demofoonte de Schuster, avec Pacchierotti, Carmignani et Ansani. On l'entend à Gênes en 1777. Elle est prima donna à Modène en 1778-79 pour un opéra de Bortiansky. Elle chante à Florence et Venise avec Guadagni et David, notamment dans Artaserse de Borghi (Semira). Elle revient sur les lagunes en prima donna cinq ans plus tard pour Il Cajo Mario de Bertoni. En 1782, elle participe à Il Trionfo della pace de Bianchi, offert à Turin en l'honneur du grand duc de Russie. Elle y chante avec le ténor Antonio Pini et le grand Marchesi. Elle est à Milan la même année dans Ezio de Guglielmi. Les fêtes pour l'ascension de 1783 sont l'occasion de retrouver Venise, avec Nettuno ed Egle d'Antonio Pio et une reprise d'Orfeo ed Euridice dans la version Bertoni, avec le castrat Ceccarelli. En 1785, c'est dans Ricimero de Zingarelli qu'on l'y entend, avec Giacomo David. Lucia Alberoni chante aussi à Bologne en 1788 dans Artarsese de Guglielmi et Cleomene de Sarti avec Roncaglia. Elle chante encore à Florence en 1791-92.

Elle participe apparemment peu au genre léger, même si on la retrouve dans Il Geloso al cimento d'Anfossi, à Lucques.