Délicieuse voix de contralto et interprète charmante, la Gafforini est le pendant léger de la tragédienne Grassini, et contribue à repopulariser la voix grave chez les femmes, que l'on retrouve ensuite souvent chez Rossini.
Elle débute peut-être à Vienne en 1789, avant de briller en Italie. C'est à Venise qu'on l'entend entre 1796 et 1799, avec une certaine Maria Anna Gafforini (sa sœur ?) : elle chante Amor l'astuzia insegna de Gardi avec la Morichelli et la basse Rafanelli, ou encore L'Ubbidienza per astuzia de Mayr. À cette époque, la contralto assume encore parfois des rôles sérieux, notamment dans Giovanna D'Arco d'Andreozzi, avec le ténor Babbini. On l'entend aussi comme seconda donna à Vérone auprès d'Anna Davya et Roncaglia dans Didone abbandonata de Paisiello. En 1800, Elisabetta s'illustre dans deux farse de Gazzaniga et Portogallo pour le carnaval de Trieste ; elle paraît à Turin la même année comme primo uomo.
La Gafforini brille ensuite à Lisbonne comme prima buffa, en même temps que la Sardi-Bussani et le ténor Brida. En 1804, elle incarne par exemple Camilla de Fioravanti et des œuvres de Portogallo.
C'est à la Scala qu'on l'accueille le plus fidèlement entre 1801 et 1811 : elle y est adulée, et chante Mosca, Mayr, Fioravanti, Guglielmi, etc. notamment pendant l'occupation napoléonienne. Là encore, elle triomphe dans le genre comique, sans délaisser entièrement le style serio : elle campe le primo uomo dans Abradate e Dircea de Nicoloni en 1811.
En 1812, la Gafforini paraît à Naples avec le ténor Donzelli dans Che Originali! de Mayr. C'est à elle que l'on propose la création du Barbiere di Seviglia de Rossini, mais la diva exige un cachet trop important et c'est Geltrude Giorgi-Righettti qui participe à cette production mémorable.
En 1717, elle incarne un personnage travesti à Venise dans Lanassa de Mayr, mélodramme héroïque donné avec la Festa-Maffei et le ténor Tacchinardi.
Étienne de Jouy évoque ainsi la cantatrice :
Je connaissais de réputation La Dama soldato et la Gafforini, pour qui cet opéra avait été composé ; je trouvai l'une et l'autre encore au dessus de ce qu'on m'en avait dit ; ces voix de contre-alto ont un charme prodigieux, et d'ailleurs aucune cantatrice italienne, avant que nous ayons vu à Paris Mme Pasta, n'avait joué et chanté avec autant d'expression que la Gafforini. On assure même que cette expression allait quelquefois si loin, que le vice-roi d'Italie, immédiatement après son mariage après la princesse de Bavière, fit défendre à la cantatrice de chanter à Milan un certain air Chi vuol la bella rosa, qu'elle plaçait dans tous ses opéras. Cette cantatrice avait d'ailleurs un autre genre de célébrité ; mais j'ignore à quelle point cette célébrité était méritée [...]
Paul Scudo laisse un commentaire flatteur de la Gafforini dans une notice sur les contraltos :
Elisabetta Gafforini a été l'une des plus charmantes virtuoses du commencement du dix-neuvième siècle. [...] Elle possédait une voix de contralto très-souple et très-sonore, qui montait au fa et descendait au la. Cette cantatrice se fit particulièrement admirer dans La Dama soldato de Federici, Ser Marc'Antonio de Pavesi [Milan, 1810], et dans Il Ciabatino.
Le même cite deux vers publiés à Milan en 1803 :
La vedi o l'odi, eguale è il tuo periglio :
Ti vince il canto, e ti rapisce il ciglio. |