Ce castrat est originaire de Bergame, tout comme le ténor Giacomo Davide, étoile du chant en devenir. Les deux chanteurs interprètent ensemble L'Omaggio sincero de Lenzi dans leur ville natale en 1775, et probablement d'autres pages de ce compatriote chargé de la musique à la basilique Santa Maria Maggiore, comme diverses Lamentazioni. Tajana fait aussi partie d'une loge maçonnique locale en 1785.
Le soprano est à Pavie en 1777 comme secondo uomo, puis à Lodi et Forlì en 1779 pour interpréter Antigono d'Anfossi, entre autres. Il se produit ensuite à Gênes et Alessandria avant de gagner Munich où il chante avec le ténor Hartig, Elisabeth Wendling, le castrat Dal Prato et la basse Zonca comme Scitalce dans Semiramide de Salieri en 1782. Il ne s'y éternise guère et paraît ensuite à Novara (Epponina de Giordani avec Davide et Camilla Pasi-Sarti) et Pavie, puis en 1784 comme prima donna à Rome, notamment dans Andromeda e Perseo de Marescalchi avec le soprano Folicaldi et la basse Fischer.
Pour le carnaval 1786, Tajana est à Turin avec Anna Pozzi et encore le ténor David, comme premier chanteur, rang qu'il occupe encore à Venise en 1789, par exemple dans Ipermestra d'Astaritta avec la Macciorletti et le ténor Fantozzi. Entre-temps, il passe par Modène avec Anna Andreozzi.
Le castrat se fait entendre à Londres en 1791, dans des concerts dans la compagnie de Gallini avec Davide, la basse Albertarelli et la soprano Poggi-Cappelletti. On doit alors monter Pirro de Paisiello et surtout L'Anima del filosofo de Haydn, lequel indique dans sa correspondance que l'opéra a pour chanteurs l'excellent Davide, Rosa Lops (ou Capranica) et un castrat non nommé mais décrit comme n'ayant rien d'extraordinaire. La littérature relaie abondamment l'hypothèse selon laquelle ce castrat serait un certain Dorelli, présent dans la compagnie mais dont on ne sait strictement rien ; mais c'est parce que Tajana, lui bien actif aux concerts Salomon avec les chanteurs de la troupe, est erronément considéré comme ténor. Il faudrait connaître d'autres partitions écrites pour lui, mais l'air Al tuo seno fortunato est suffisamment difficile pour indiquer qu'il ne s'agissait pas d'un chanteur totalement nul. Tajana semble au contraire parfaitement correspondre à la description d'un chanteur menant une vraie carrière, sans doute bien préparé vocalement mais sans l'éclat et le talent des plus grandes vedettes du temps, comme Marchesi, Rubinelli, Pacchierotti... Quoi qu'il en soit, ni l'opéra de Haydn ni Pirro ne sont donnés en raison de complications politiques empêchant la réouverture du King's Theatre. L'Anima del filosofo ne sera créé qu'au XXe siècle, et l'air du Génie figure parmi les pages de bravoure de Haydn les plus populaires.
Tajana retrouve Lodi l'année suivante, où il semble achever sa carrière.
Son renom semble être resté plutôt local, malgré quelques prestations à Londres et Munich. À cette époque, les castrats, qui plus est de talent, se font rares et certains chanteurs de moindre envergure ont pu bénéficier de la situation (Bartolini, Neri, Bravura...). |