Gasparo voit probablement le jour à Vérone.
En 1760, Casanova est à Rome pour assister à l’immense engouement que déclenche le jeune et beau Gasparo Savoj au théâtre Alibert :
Ce castrat avait une jolie voix, mais son principal mérite était sa beauté […] Serré dans un corset bien fait, il avait une taille de nymphe et chose incroyable, sa gorge ne le cédait en beauté et en forme à aucune gorge de femme ; c’était surtout par là que ce monstre faisait ravage […] le tournoiement tendre et modeste de ses yeux noirs portait le ravissement aux cœurs.
À Rome, on retiendra la prestation du beau soprano dans La Buona Figliuola de Piccinni, avec le rôle virtuose de la marquise Lucinda dont l’air Furia di donna irata est resté célèbre. En 1761, il est au Capranica dans Il signor dottore sur un livret de Goldoni, de compositeur inconnu. Il est aussi Lisaura dans La Fiera di Sinagaglia de Fischietti, toujours de Goldoni, avec Carattoli. Au teatro Argentina, il joue les prime donne, comme Tamiri dans Farnace, Semiramide, Berenice dans le Lucio Vero de Bertoni, Zenobia de Traetta, Servilia dans Tito Manlio de Guglielmi, etc. Il est entouré d’excellents chanteurs, comme Ottani, Elisi, Caffarelli, Tibaldi…
En 1765, Savoj est à Venise, et chante dans Nitteti de Sarti, dans un rôle masculin. Cette même année, il se rend à Londres où il chante abondamment à Haymarket ou en concert jusqu’en 1777, se confirmant plus comme un chanteur solide et plaisant que comme une grande vedette. En 1770, il participe au Disertore de Guglielmi au King’s Theatre. Comme durant l’ensemble de sa carrière, Savoj se consacre aussi bien au genre bouffe qu’au tragique ou à l'oratorio, dans des rôles masculins et féminins. Il interprète J.C. Bach, notamment Gioas, re di Giuda, remplaçant Cecilia Grassi indisposée, l’opéra Carattaco de 1767 ou la cantate Cefalo e Procri. En 1772, il interprète une Passione de Naselli avec la contralto Achiapati et la basse Morigi. Il chante aussi à Dublin en 1769 et 1770, où le jeune Michael Kelly entend sa voix aiguë.
Savoj se fait ensuite entendre à Paris au Concert spirituel, en 1777 et 1778. Le reste de sa carrière se déroule en Italie.
Le nouveau Teatro Riccardi de Bergame est inauguré en 1786 avec son Énée dans la Didone abbandonata d’Anfossi. De 1787 à 1791, Savoj chante régulièrement comme secondo uomo au teatro Regio de Turin, par exemple dans Ifigenia in Aulide de Cherubini et La Disfatta dei Mori de Gazzaniga. Ses célèbres partenaires sont Marchesi, Andrea Martini, Marchetti-Fantozzi, Domenico Mombelli… En 1792, Savoj chante dans Pirro de Zingarelli à la Scala de Milan, avec Marchesi.
À défaut d’un talent exceptionnel, ce castrat a connu une belle et longue carrière auprès des plus grands chanteurs. |