Castrat soprano élève de la fameuse école de Bologne fondée par Pistocchi, il est un exemple du grand style et de la perfection technique « à l’ancienne », d’après Burney : le chanteur ne surchage pas sa partie, exécute trilles, grupetti et mordants aux bons endroits, et chante à pleine voix. Sa voix n'est pas d'une étendue incroyable, comme les chanteurs des générations suivantes.
Pasi voyage beaucoup en Europe, très fêté : il débute au San Cassiano de Venise en 1704 dans La Maschera levata al vizio de Gasparini, et y retourne en 1707-08, chantant encore Gasparini et Lotti avec la soprano Pini ou encore le couple Boschi. Entretemps, il chante à Modène (?) et une saison à Florence où il s'affiche comme virtuose du duc de Parme, par exemple dans Artaserse d'Orlandini. Pasi est à Düsseldorf pour chanter dans Tassilone de Steffani en 1709, une ville où il reste jusqu'en 1713. La distribution compte plusieurs excellents chanteurs employés par l'électeur Johann Wilhelm, dont Antonio Tosi et Valeriano Pellegrini. En 1714, il se rend brièvement à Cassel avec Berenstadt ; dans une lettre à Steffani, le compositeur Fedeli se lamente de la brièveté de leur séjour alors qu'ils retournent à Düsseldorf. Ce n'est apparemment qu'après 1716 que le castrat retrouve l'Italie.
En effet, Pasi retrouve la Péninsule à Reggio Emilia et Brescia. Il s'illustre avec une Bordoni à ses débuts et la grande Romanina dans Ariodante de Polarollo à Venise en 1716-17. Sa carrière se poursuit à Gênes, Bologne, Milan, Turin, à divers rangs, pour chanter Fiorè, Orlandini, Polarollo ou même Domenico Scarlatti, ce qui lui permet de côtoyer des artistes comme Cuzzoni, le ténor Paita, le castrat Tempesti ou encore la soprano Vienna Mellini. Pasi est à Rome en 1720, où il interprète Gasparini, et notamment le rôle titre de Faramondo. On le trouve encore à Venise cette même année puis en 1722-23 dans des opéras de Porta, Pietragrua, Orlandini, mais aussi à Bologne et Pesaro. En cette grande époque des contraltos, il chante avec Mazzanti, Lancetti, Fabri, Vico, et la Merighi lors d'un séjour à Naples en 1721 (Gli Orti esperidi, première œuvre de Metastasio, ci-contre). Son collègue Berenstadt paraît à ses côtés en 1724 et avoue que « le grand Pasi » chante d'une manière telle qu'il fait pleurer « tous ceux qui ont du goût. »
Entre Gênes, Parme et Florence, le soprano est à Turin avec la Merighi et Bernacchi en 1726. En 1727, après une représentation d'Arianna e Teseo de Porpora donné au fameux San Giovanni Grisostomo de Venise, l'abbé Conti écrit « Pasi fait des merveilles », mais lui préfère la jeune et brillantissime virtuose Giovanna Gasparini. Il n'empêche qu'en 1730, Pasi est primo uomo dans Dalisa de Hasse, avec rien moins qu'Anna Girò, la Bordoni, et le tout jeune ténor Amorevoli. Son cachet est alors plus de deux fois supérieur à celui de la Girò. En 1728, on l'avait également entendu jusqu'à Bruxelles. Pasi est encore à Florence en 1732, et l'année suivante à Mantoue : Il Demetrio de Ciampi est le dernier livret où son nom apparaît, aux côtés de la mezzo-soprano Posterla, de la basse Venturini et des castrats Agostino Fontana et Minelli.
Hiller ne tarit pas d'éloges sur sa maîtrise et son excellente musicalité, tandis que Quadrio mentionne Antonio Pasi comme « musico di molto valore ». Dans son Essai sur la musique ancienne et moderne de 1753, Delaborde rappelle quant à lui :
M. Mancini, dans ses pensées sur le chant, dit qu'il était doué d'un goût & d'une intelligence surprenante dans l'art du chant. À une méthode très simple, et au portamento di voce d'une grande netteté, il sut allier le premier de petites licences qui faisaient le plus grand effet. Son style en devint tout-à-fait singulier & piquant. Mais il eut alors et depuis de mauvais imitateurs qui abusèrent de son exemple, & par trop d'ornements gâtèrent et défigurèrent leur chant à ne pouvoir y rien comprendre. Mais ne voulant briller par des variations & des ornements déplacés, ils perdirent l'expression, cette partie si essentielle de la Musique, et cette expression tant vantée vers la fin du seizième siècle, & au commencement du suivant, il s'en faut bien qu'on l'ait entièrement retrouvée dans celui-ci.
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