Gaetano GUADAGNI |
ca 1725 – 1792 |
Ce célébrissime castrat voit le jour près de Lodi vers 1725, et rien n'indique qu'il reçoive une éducation vocale particulière. Il est engagé en 1746 comme chanteur à la chapelle San Antonio de Padoue, et paraît sur scène à Venise, notamment en Mitrane dans Zenobia de G. Michieli. Après quelques prestations au sein d'une troupe de comédiens en qualité de jeune premier à Parme, il se rend à Londres en 1748 avec une compagnie de chanteurs bouffes, comme primo di mezzo-carattere. Selon Burney, sa voix est alors belle mais mal disciplinée.
Haendel repère le jeune castrat et y perçoit sans doute un potentiel intéressant, allant sans doute jusqu'à parachever sa formation : il lui compose l'air O God, who from the suckling's mouth dans le Foundling Hospital Anthem, lui confie une reprise de Samson et lui écrit de nouvelles versions des airs But who may abide et Thou art gone up dans Messiah en 1750 avant le rôle de Didymus dans Theodora. L'année suivante, le castrat reprend peut-être Cyrus dans Belshazzar et chante Ahasuerus dans Esther. Guadagni est parallèlement formé par David Garrick, immense acteur et directeur du Drury Lane.
Enrichi de ces expériences, Guadagni est alors un chanteur-acteur accompli. Il se produit au concert Spirituel de Paris en 1754 avant de repasser à Londres dans le théâtre de Garrick, pour The Fairies de J.C. Smith avec la soprano Frasi. On l'entend également à Lisbonne, avec Caffarelli, puis c'est le moment d'affirmer son talent en Italie.
En 1758, Guadagni est à Venise en Arbace du Catone in Utica de Ciampi avec le primo uomo Domenico Ciardini. Il se hisse bientôt lui-même à ce rang, entre Venise, Naples et Turin, s'illustrant par exemple dans Astrea placata de De Majo avec Clementina Spagnoli et Raaff, ou encore le premier opéra de Johann Christian Bach, Artaserse.
C'est à Vienne qu'on le retrouve ensuite, pour une rencontre avec un compositeur à l'automne de sa glorieuse carrière, Hasse (qui lui confie son Trionfo di Clelia), et celui à qui son nom sera dorénavant étroitement associé, le chevalier Gluck. Ce dernier lui confie le pasticcio Arianna avant d'exploiter toute la richesse expressive et dramatique de Guadagni dans un Orfeo historique, en 1762. Le livret est de Calzabigi et revendique plus que tout autre les volontés réformatrices du moment. Le contralto demeure fidèle à la cour d'Autriche et continue de s'y produire régulièrement jusqu'en 1767, créant dans l'intervalle Oreste dans Ifigenia in Tauride de Traetta et Telemaco de Gluck, qui lui adapte aussi le rôle titre d'Ezio créé à Prague. Ornement de la cour impériale, Guadagni se rend à Francfort en 1764 pour le couronnement de Joseph II, puis à Innsbruck l'année suivant pour le mariage de l'archiduc Leopold. Parmi ses partenaires figurent le ténor Tibaldi et Rosa Tartaglini, ainsi que le castrat Giovanni Toschi.
Entre 1767 et 1769, Guadagni brille de nouveau à Venise et chante notamment L'Olimpiade de Guglielmi ou encore Il Re pastore de Galuppi. Il partage la scène avec Anna De Amicis et même le jeune Pacchierotti. Sa voix semble néanmois avoir évolué, ce qui déçoit les Anglais lorsque Guadagni retourne à Londres entre 1769 et 1771, paraissant dans un pasticcio autour d'Orfeo. Burney s'en fait l'écho :
Sa tournure était exceptionnellement élégante et noble ; son expression pleine de beauté, d'intelligence, de dignité ; ses attitudes et ses gestes étaient si gracieux et si justes qu'ils auraient pu être d'excellents modèles pour un sculpteur. Mais, bien que sa façon de chanter fût parfaitement soignée, subtile et raffinée, d'emblée sa voix parut décevoir tous les auditeurs. Ceux qui se souvenaient de ce qu'elle était lorsqu'il est jadis venu en Angleterre la trouvaient mince et faible en comparaison.
Guadagni se rend ensuite à Venise, qui lui demeure fidèle et où il est nommé Cavaliere di San Marco, ainsi que Vérone puis Munich sur invitation de l'électrice. Après trois années en Bavière et une ultime saison sur les lagunes en 1775-76 dans Artaserse de Borghi, Aristo e Temira de Bertoni et Mayr et une nouvelle version d'Orfeo par Bertoni, le castrat chante à Postdam pour Frédéric II, qui le gratifie d'une somptueuse tabatière d'or et de diamants.
Retiré des scènes, Guadagni jouit de son repos dans sa villa à Padoue, donnant parfois l'Orfeo dans un théâtre de marionnettes ou chantant à San Antonio. Ses largesses dévorent une fortune pourtant conséquente, et le castrat finit ruiné en 1785.
L'art de Guadagni correspondait assurément aux aspirations de certains artistes du moment pour un opéra plus au drame et au chant moins alambiqués. Le rôle d'Orphée est certes d'une belle et noble sobriété, mais ne doit pas cacher les capacités vocales du castrat, pour lequel Gluck écrit le virtuose Se un fulmine sospendi dans la seconde version d'Ezio. C'est toutefois avec parcimonie et un goût parfait que l'artiste dispensait les sortilèges de sa voix, par exemple dans des notes puissantes achevées en sons filés « cherchant à fuir l'orchestre et l'harmonie. », selon Burney. Il s'agissait d'un modèle suivi par un autre castrat réputé pour sa sobriété et son sens du pathétique, le castrat Pacchierotti.
Notons que la petite sœur de Gaetano, Maria Lavinia, mène également une honnête carrière à l'opéra dans le répertoire bouffe, y compris à l'étranger. Elle épouse le compositeur Alessandri. |
Foundling Hospital Anthem |
alto |
G.F. Haendel |
1749 |
Londres |
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A. Köhler, Camarata musica dir. D. Köhler – CD Berlin classics |
Messiah |
alto |
G.F. Haendel |
1750 |
Londres |
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Enregistrement au choix |
Theodora |
Didymus |
G.F. Haendel |
1750 |
Londres |
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Enregistrement au choix |
The Fairies |
Lysander |
J.C. Smith |
1754 |
Londres |
> air Say, lovely dream |
L. Davies, Archangelo dir. J. Cohen – Arias for Guadagni, CD Hyperion 2012 |
Antigono |
Alessandro |
A. Mazzoni |
1755 |
Lisbonne |
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Rôle abrégé : M. Oro, Orchestra Divino Sospiro dir. E. Onofri – CD Dynamic 2014 |
Nitteti |
Sammete |
T. Traetta |
1757 |
Reggio Emilia |
> air Se d'amor, se di contento |
J. Bowman, dir. R. Weikert – retransmission de représentation du pasticcio Porporino, Aix-en-Provence, 1979 |
Artaserse |
Arbace |
J.C. Bach |
1760 |
Turin |
> air Per questo paterno amplesso > air Vo solcando un mar crudele * Perche tardi o morte
> air Vo solcando un mar crudele |
P. Jaroussky, Le Concert de la loge dir. J. Chauvin – Forgotten arias, CD Erato 2023
P. Jaroussky, Le Cercle de l'harmonie dir. J. Rhorer – La Dolce Fiamma, CD Virgin Classics, 2009
B. Mehta, Akademie für alte Musik Berlin dir. R. Jacobs – Che puro ciel! The rise of classical opera, CD Harmonia mundi 2013 |
Tigrane |
Tigrane |
N. Piccinni |
1761 |
Turin |
> air Ah Cleopatra |
A. Zaeppfel, ensemble Stradivaria dir. D. Cuiller – Pasticcio per il castrato Gaetano Guadagni, CD Musidisc 1987 |
L'Isola disabitata |
Gernando |
N. Jommelli |
1761 |
Stuttgart |
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Rôle transposé : R. Abbondanza, orchestre de l'opéra de Rome dir. R. Alessandrini – Retransmission de représentations, Rome, 1998 |
Il Trionfo di Clelia |
Orazio |
J.A. Hasse |
1762 |
Vienne |
> airs De' folgori di Giove * Dei di Roma
> air Resta o cara
> air Dei di Roma, ah perdonate
> air Saper ti basti o cara |
M.E. Cencic, Armonia atenea dir. G. Petrou – Rokoko, CD Decca 2014
A. Zaeppfel, ensemble Stradivaria dir. D. Cuiller – Pasticcio per il castrato Gaetano Guadagni, CD Musidisc 1987
B. Mehta, Akademie für alte Musik Berlin dir. R. Jacobs – Che puro ciel! The rise of classical opera, CD Harmonia mundi 2013
M.E. Cencic, Armonia atenea dir. G. Petrou – Captation de concert, 2014 |
Orfeo ed Euridice |
Orfeo |
C.W. Gluck |
1762 |
Vienne |
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Enregistrement au choix |
Ifigenia in Tauride |
Oreste |
T. Traetta |
1763 |
Vienne |
> air Dormi Oreste
> duo Ah, mi palesa al meno |
A. Krutko, Lautten Compagney Berlin dir. W. Katschner – retransmission de représentations, Heidelberg 2014
C. Gonzalez, dir. B. Campanella – retransmission de représentations, Martina Franca, 1987
Enregistrement au choix
K van Neste, Das neue mannheimer Orchester dir. A. Muskens – The Music of the Mannheim Court Orchestra, CD 2020
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Ezio [2] |
Ezio |
C.W. Gluck |
1764 |
Vienne |
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F. Fagioli, Orchester der ludwigsburger Schlossfestspiele dir. M. Hofstetter – CD Oehms |
L'Olimpiade |
Megacle |
F. Gassmann |
1764 |
Naples |
> duo Nei giorni tuoi felici |
R. Basso, Venice Baroque Orchestra dir. M. Chryssicos – pasticcio L'Olimpiade, CD Naïve, 2012 |
Romolo ed Ersilia |
Romolo |
J.A. Hasse |
1765 |
Innsbruck |
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M. De Liso, Café Zimmermann dir. A. Cremonesi – retransmission de représentations, Innsbruck 2011 |
Telemaco |
Telemaco |
C.W. Gluck |
1765 |
Vienne |
> airs Ah non turbi il mio riposo * Se per entro alla nera forresta |
G. Bumbry, orchestre de l'opéra de Vienne dir. E. Märzendorfer – retransmission de représentations, Vienne, 1987
Enregistrement au choix |
Ruggiero |
Ruggiero |
P.A. Guglielmi |
1779 |
Venise |
> air Nel suo dolor ristretto
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F. Mineccia, Orchestra farnesiana dir. L. Oberti – Mozart Italian Arias, CD Glossa 2022 |
Il Tobia |
Tobia padre |
J. Mysliveček |
1769 |
Padoue |
> air Quando il vaso
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F. Mineccia, Orchestra farnesiana dir. L. Oberti – Mozart Italian Arias, CD Glossa 2022. Attribution incertaine |
Orfeo |
Orfeo |
Gluck et al. |
1770 |
Londres |
> air Men tiranne voi sareste
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air de G. Guadagni. A. Christofellis, ensemble Seicentonovecento dir. F. Colusso – Les Castrats au temps de Mozart, CD EMI, 1996 |
Gioas, re di Giuda |
Gioas |
J.C. Bach |
1770 |
Londres |
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K. Wessel, Das kleine Konzert dir. H. Max – CD CPO 2003 |
Orfeo |
Orfeo |
F. Bertoni |
1776 |
Venise |
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V. Genaux, Ensemble Lorenzo da Ponte dir. L. Zarpellon – CD Fra Bernardo 2016 |
Pensa a serbarmi, o cara (air) |
Ezio |
G. Guadagni |
ca 1770 |
? |
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In Ezio de Guglielmi ou Bertoni. L. Davies, Archangelo dir. J. Cohen – Arias for Guadagni, CD Hyperion 2012 |
Récital hommage |
divers |
divers |
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A. Zaeppfel, ensemble Stradivaria dir. D. Cuiller – Pasticcio per il castrato Gaetano Guadagni, CD Musidisc 1987 |
Récital hommage |
divers |
divers |
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L. Davies, Archangelo dir. J. Cohen – Arias for Guadagni, CD Hyperion 2012 |
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