C'est dans la région de Naples que Gioacchino voir le jour en 1714. Il étudie le chant avec un des castrats remarquables de son époque, Domenico Gizzi, et le remercie en choisissant Gizziello comme nom de scène.
Le jeune castrat est doté d'une magnifique voix de soprano aigu et d'un caractère affable doublé d'un physique avenant et délicat. C'est naturellement dans les rôles féminins qu'il débute à Rome, en 1729, dans les opéras de Vinci ; il n'a alors que quinze ans, et devient immédiatement le centre de toutes les conversations. Burney raconte que Caffarelli, curieux d'entendre le débutant dont on dit tant de bien, voyage spécialement de Naples, où il chante, pour assister secrètement à l'une des apparitions romaines de Conti. Saisi d'enthousiasme, il se serait écrié, au milieu des bravos : « Bravo, bravissimo Conti ! C'est Caffarelli qui le dit ! » Comportement inattendu de ce castrat pourtant de si mauvaise composition. Mais qui sait ? L'art du jeune Conti était capable de faire pleurer tous les auditeurs, ce que Goudar est bien obligée d'admettre dans ses écrits critiques sur la musique italienne.
C'est à Naples que se poursuit la carrière du soprano : en 1732, il intervient en urgence pour remplacer Nicolino dans Salustia de Pergolesi, le vieux contralto ayant trépassé brusquement pendant les répétitions. Là encore, le public plébiscite Conti. Il retrouve son maître Gizzi dans Sant'Elena al calvario de Leo et Egeria de G. DiMajo. Le castrat se produit ensuite à Gênes et Venise, par exemple dans Demofoonte de Schiassi avec la Peruzzi et Bernacchi. Conti se fait entendre à Vienne en 1734, créant notamment La Betulia liberata de Reutter et Metastasio.
En 1736, Haendel convie le jeune talent à Londres. Le castrat reprend d'abord Ariodante (transposé d'une tierce) puis brille dans Atalanta, où sa voix aiguë et expressive fait des merveilles ; l'air Care selve connaît d'ailleurs une rare fortune par la suite. Rejoint par le contralto Annibali, Gizziello crée ensuite Arminio, Giustino et Berenice, avant de quitter Londres. Haendel parle de lui comme d'un « génie en puissance » !
En 1738, Conti retrouve le continent, à commencer par Rome, en qualité de primo uomo. Il y côtoie les castrats Amadori et Pignotti. C'est d'ailleurs surtout à Rome et Turin qu'il paraît durant les années 1740, avec quelques apparitions également à Fano, Sienne, Florence, Venise et Naples (où il chante avec Caffarelli en 1747-48), interprétant les pages de Lampugani, Jommelli, Leo, Bernasconi, Pescetti, Arena, Conti, etc. En 1749-50, Gizziello est à Venise et chante notamment Artaserse de Pampani avec les castrat Puttini et Leonardi ainsi que Domenica Casarini. Jusqu'en 1752, il se partage entre Reggio, Padoue et Milan, où il chante Alessandro nell'Indie de Perez en 1752 avec Cornacchia et la Visconti. Est-ce là qu'il est engagé pour la cour de Lisbonne où le roi convoque une brillante troupe pour chanter les œuvres de Perez ?
Quoi qu'il en soit, Gizziello gagne la capitale portugaise la même année et rejoint une troupe qui compte le grand ténor Raaff et les castrats Gallieni, Luciani et Manzuoli dans les principaux rôles. Perez propose plusieurs opéras métastasiens les années suivantes, comme L'Olimpiade. On entend aussi des pages de Mazzoni, notamment pour l'inauguration du somptueux nouvel opéra du Tage en 1755, et Gizziello participe très probablement à la serenata L'Ippolito de F. De Almeida. Mais sept mois après l'inauguration survient un cataclysme : Lisbonne est en ruines en raison d'un effroyable tremblement de terre. Gizziello y échappe heureusement, car il est peut-être déjà parti pour Madrid, étant donné qu'il est remplacé par Caffarelli comme primo uomo en août dans Antigono de Mazzoni. On a pu lire que Gizziello quittait la scène afin d'entrer dans les ordres ; mais il est encore convié à Madrid par Farinelli, avec le ténor Raaff et Mazzoni, chantant Nitteti et La Danza. Conti a même l'honneur de se produire avec Farinelli lui-même, qui le qualifie de « vieil ami », dans La Pesca de Conforto. Ce séjour madrilène dure une année.
Il est probable que le soprano prenne sa retraite après, vers 1756. C'est à Rome, après s'être consacré à l'enseignement, que meurt Gizziello. Sara Goudar écrit à son sujet, en 1771 :
Gizziello effaça tous les sopranistes de son temps, tant par l'harmonie de sa voix que la douceur de son chant. Il récitait au cœur et chantait à l'âme.
Une légende rapportée par Castil-Blaze alimente la légende du bon caractère et de l'humilité de Conti :
Charles III, roi de Naples, qui venait de faire construire le théâtre San-Cario, résolut d'y réunir Gizziello et Caffarelli dans Achille in Sciro, dont Pergolese avait écrit la musique pour l'inauguration de cette grande scène [en réalité l'opéra est de Sarro]. Les deux virtuoses quittèrent, l'un le Portugal, l'autre la Pologne, et vinrent au rendez-vous donné [Ni lui ni Caffarelli ne participèrent à cette inauguration]. Caffarelli produisit un effet merveilleux dans son premier air : toute la cour et le public firent éclater les transports les plus vifs, les applaudissements les plus bruyants. Gizziello, depuis, avoua qu'il se crut perdu, qu'il resta tout étourdi de ce qu'il venait d'entendre. — Néanmoins, dit-il, j'implorai l'assistance du ciel, et je m'armai de courage. » L'air qu'il devait chanter était dans le style pathétique ; le son de sa voix, si pur, si touchant, le fini de son exécution, l'accent expressif qu'il sut y mettre, et probablement aussi l'émotion que le succès de son rival venait de lui causer, tout cela, dis-je, lui fit atteindre un tel degré de sublimité, que le roi transporté se leva, battit des mains, invita la cour à l'imiter, et la salle fut ébranlée par les applaudissements prolongés de l'assistance. On partagea le prix en déclarant Caffarelli le plus grand chanteur dans le genre brillant, Gizziello, dans le style expressif. |