Basse de renom née à Dillingen, Carl Weinmüller apprend le chant à Vienne, où il fait ses débuts en 1783. Mais il n'y reste point et participe à une tournée dans de petites villes. En 1788, Weinmüller est nommé première basse et régisseur à Ofen und Pest.
Carl
est engagé au Hoftheater de Vienne en 1796 et débute dans Der Dorfbarbier de Schenck en 1796. Deux ans plus tard, il devient membre de la chapelle impériale. C'est un des premiers chanteurs de sa tessiture à Vienne pendant les fascinantes années du tournant des siècles, véritable bouillonnement stylistique où l'on joue les tragédies lyriques françaises de Gluck, Cherubini et Spontini, l'opéra italien de Paër, Cimarosa et Salieri, et les Singspiele de compositeurs germaniques qui assoient le genre national, en particulier Weigl (Der Bergsturz bei Goldau, Der Einsiedler auf den Alpen, etc.) et Gyrowetz (Der Augenartz, Agnes Sorel, Lob der Wohlthätigkeit…). Weinmüller chante par ailleurs quasiment toujours des œuvres traduites en allemand et adaptées.
Pilier de la troupe, il s'arroge la plupart des grands rôles de basse, concurrencé par Vogl et Ignaz Saal. Avec ces clés de fa s'illustrent la Willman puis surtout dès 1803 les sopranos Milder-Hauptmann et Laucher. Carl côtoie aussi sur scène la fille de l'immense basse Fischer. Ces années voient les œuvres de Mozart (traduites) s'imposer au répertoire : il incarne ainsi toutes les grandes basses mozartiennes (Osmin, Figaro, Leporello, Sarastro, Alfonso)… On l'apprécie par exemple particulièrement dans Die Zauberflöte en 1801 avec Therese Saal et Therese Gassman-Rosenbaum, dans le nouveau théâtre de Schikaneder. Il interprète Der Kosakenoffizier en 1804, traduit du français et signé Dunonchan et Gianella. Cherubini séjourne à Vienne où il écrit Faniska en 1806, avec un rôle pour Weinmüller. Weinmüller est également lié à Beethoven, dont il crée notamment Rocco dans Fidelio (là encore avec Vogl et Saal), avec le ténor Radicchi.
Fidèle de l'impératrice Marie-Thérèse, la basse participe très souvent à ses concerts privés : pas moins de 36 fois entre 1801 et 1803 ! Il parvient à y arracher le rôle de basse de Die Schöpfung à son créateur, Saal. Les concerts sont nombreux à Vienne, et Carl chante par exemple une version concertante de Tamerlan de Winter en 1809, et paraît avec le ténor Simoni en 1811. C'est aussi un régulier des concerts caritatifs de la Tonkünstler-Sozietät : on l'y entend par exemple dans Die Worte des Heilands am Kreuze de Haydn (1798, avec T. Gassmann, et à plusieurs reprises ensuite) ou Endimione e Diana de Hummel (1807).
Weinmüller chante au Hofoper jusqu'en 1823, participant à la première viennoise de Der Freischütz en Cuno. Quand il doit remplacer le titulaire de Sarastro en 1822, le vétéran reçoit une ovation.
Son épouse Aloisia (née Mörisch) est engagée à ses côtés en 1798.
Voici ce qu'écrit de lui Constant von Wurzbach quelques décennies après sa mort :
Sa voix, capable des moindres nuances et parfaitement éduquée – une véritable voix de basse brillante, puissante et virile – s'étendait du ré sous la clé de fa au fa du ténor avec un timbre à la pureté argentine. Il y unissait la diction la plus nette et un tendresse de style qui allait droit au cœur; et il savait fusionner action et chant au service de l'art. […] Weinmüller n'était pas seulement un grand chanteur d'opéra, mais aussi un non moins parfait interprète de musique sacrée, et dans le Tuba mirum du requiem de Mozart tout comme dans les oratorios de Haydn, il était difficile de lui trouver un un égal.
Tout comme son collègue Vogl, Weinmüller est un interprète charnière entre les différents genres qui traversent Vienne en 1800 et l'avènement du romantisme allemand.
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