Liste des sopranos

Liste des contraltos

Liste des castrats

Liste des tenors

Liste des basses

Charlotte Wilhelmine Franziska BRANDES

1765 – 1788

dite Minna

Minna BrandesCharlotte Wilhelmine est issue d'une famille de chanteurs-acteurs comme en emploient alors les troupes théâtrales germaniques, où les artistes participent aux pièces parlées mais sont aussi capables de chanter, et parfois extrêmement bien. Sa mère est actrice, son père acteur réputé, directeur de théâtre et écrivain. Ils sont liés au célèbre homme de lettre Lessing, parrain de l'enfant. Ayant vu le jour à Berlin, Minna commence des études musicales à Dresde, puis retrouve Berlin où la jeune Gertrud Mara lui enseigne le chant. Voici le récit que fait le père de Minna dans ses mémoires :
[...] son maître de musique, M. Transchel, composa quelques variations sur un air de l'opéra du Déserteur [de Monsigny], afin de rendre plus brillant le début de son écolière auprès de cette grande artiste. Mme Mara entendit la chanteuse, fut ravie de son talent, et, dès ce moment, elle se fit une agréable occupation de lui donner tous les jours quelques leçons de chant. [...] le maître de chapelle, M. Schuster, composa la musique, et ajouta au rôle de ma fille, qui désormais fut connue dans le monde musical sous le nom de Minna Brandes, un air très brillant, qu'elle chanta avec le plus grand succès.
Bondini [basse et directeur de théâtre], qui se réjouissait de voir sa troupe enrichie d'un sujet dont la valeur était si distinguée, et qui savait d'ailleurs apprécier ses connaissances en musique, lui fit présent d'un riche médaillon en or, et lui accorda bientôt des appointemens particuliers qu'il porta à 400 écus par an.

Quelques temps après, l'ambassadeur suédois, qui avait annoncé à sa cour que le talent de ma fille donnait les plus grandes espérances, reçut l'ordre de l'engager pour l'opéra de Stockholm [...]. Mais quelque flatteuses que ces propositions, réitérées par M. Neumann [Naumann], fussent pour ma fille, je ne pus cependant me résoudre à la soustraire si jeune à ma surveillance.
Dès sept ans, l'enfant paraît sur en effet scène et passe pour un prodige à Weimer, Leipzig et Dresde. Schuster lui offre un rôle dans Der Alchemist : Minna n'a que huit ans, en 1778 ! C'est l'anecdote relatée ci-dessus. En 1780, la jeune soprano est engagée à la troupe de Mannheim, où elle crée le rôle titre de Rosamunde de Schweitzer – Mozart suit la création de près et se montre sévère sur l'écriture vocale, mais il est vrai qu'il est mécontent de voir sa chère Aloysia Weber y manquer d'occasions de briller. Minna se fait entendre à Hambourg, Berlin (où elle parfait son art auprès du castrat Concialini), Weimar, jusqu'à une tournée triomphale en famille dans les pays baltes. Minna y interprète par exemple un air de La Belle Arsène de Monsigny.

Les Brandes semblent installés à Hambourg à partir de 1784, Minna se faisant applaudir comme actrice et comme chanteuse dans des Singspiele traduits du français (Zémire et Azor) mais aussi du véritable répertoire allemand, comme Jahrmarkt de Benda, Konstanze de Die Entführung aus dem Serail (1787) ou le dernier rôle qu'elle aborde avant sa mort : Leonore dans Doktor und Apotheker de Dittersdorf. Elle doit affronter au départ la concurrence de deux autres chanteuses, et peine à s'imposer à ses débuts dans Alceste de Schweitzer, en seconda donna. On entend aussi la jeune fille faire étalage de ses divers talents en concert : un programme de 1786 prévoit un air de bravoure tiré d'un certain Figaro (pas de Mozart) et un air de Paisiello ainsi qu'un morceau pour piano de Kozeluch. La célèbre pianiste et musicienne Paradies se joint à elle pour l'occasion.
Ces succès sont encore embellis par sa mort à seulement 23 ans : celle qui inspirait déjà des poèmes de son vivant devient une héroïne du panthéon artistique allemand. On la pleure alors comme l'une des meilleures chanteuses allemandes.
Belle, dotée d'une voix expressive et suffisamment brillante, elle était aussi une excellente pianiste et composait. Son père et un éditeur de ses amis publient l'année de son décès une biographie idéalisée et de la musique composée par Minna. Cette dernière avait apparemment l'ambition de composer un opéra et de publier des recueils d'airs en allemand.

Rosamunde Rosamunde A. Schweitzer 1778 Mannheim
  E. Marguerre, Radio Symphony Orchestra Stuttgart dir. J.W. de Vriend – retransmission de représentations, Schwetzingen, 2012